lundi 17 janvier 2011

Du respect des droits de l'homme.

"Nous allons réévaluer les motifs pouvant donner lieu à la déchéance de la nationalité française. Je prends mes responsabilités. La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un fonctionnaire de police ou d'un militaire de la gendarmerie ou de toute autre personne dépositaire de l'autorité publique. La nationalité française se mérite et il faut pouvoir s'en montrer digne


Nicolas Sarkozy, discours de Grenoble du 30 juillet 2010.








Si je me permets de revenir près de 6 mois en arrière pour évoquer le "Discours de Grenoble", c'est parce que je pense qu'une limite importante a été dépassée cet été. Ces propos indignes d'un président de la République justifient l’inacceptables, et diffusent le message implicite qu'il existe en France, plusieurs catégories de citoyens. C'est un problème grave et il me semble important d'en avoir conscience et d'en discuter.


En effet, par l’élection démocratique qui l’a pourvu au poste de Président de la République, Nicolas Sarkozy ne s’est pas seulement vu attribuer  la haute et honorifique fonction de dirigeant d’Etat. Il a également choisi d’endosser une lourde responsabilité, celle de représenter les français, certes, mais aussi  les valeurs et les idéaux de la France. 


Or, le fiasco qu’a été le débat sur l’identité nationale nous aura  au moins appris une chose : il est difficile de cerner  précisément ce qui fonde notre identité française car celle-ci est multiple, subjective et en constante évolution. 

Pourtant, si il ya bien des valeurs qui sont communément reconnues et que nous revendiquons fièrement comme étant françaises, ce sont celles des droits de l’Homme. C’est en France qu’a été rédigée la Déclaration des Droits de l’Homme dont la première phrase de l’article premier est «  les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droit ». 


Vendredi 30 juillet 2010, lorsque Nicolas Sarkozy a déclaré « La nationalité française doit pouvoir être retirée à toute personne d'origine étrangère qui aurait volontairement porté atteinte à la vie d'un policier, d'un gendarme. » il a bafoué cet article, allant à l’encontre des valeurs qu’il se doit de représenter


En effet, le Président s’est non seulement permis de stigmatiser une partie de la population française mais il a également évoqué la possibilité d’une inégalité devant la loi :  les français d’origine étrangère auraient plus à perdre s’ils commettaient un acte de délinquance que les français « pure souche » : on leur retirerait leur nationalité, on leur arracherait donc une partie de leur identité, ils ne seraient plus « dignes » d’être français. 


Ce discours en plus d’être juridiquement inapplicable, est moralement inacceptable. N’est-ce pas contradictoire de prétendre pouvoir décider qui est français quand on est soi-même incapable de respecter les idéaux fondamentaux de la France? Moi-même, comment puis-je  me sentir française si celui qui représente mon pays ne se montre pas digne de mon Histoire et des valeurs dont je suis fière? 


Aujourd’hui, j’ai honte pour Nicolas Sarkozy, j’ai honte pour mes compatriotes et j’ai honte pour la France.  J’ai honte et j’ai peur car je pense qu’à trop vouloir jouer le jeu de la sécurité pour s’attirer la sympathie des votants d’extrême-droite, notre Président émet des idées dangereuses qui me rappellent des moments bien sombres de notre Histoire. 


Bien à vous,


L'octopus



5 commentaires:

  1. N. Sarkozy ne peut pas créer la déchéance de la nationalité française, pour l'excellente raison que celle-ci existe déjà. Elle est prévu à l'article 25 du code civil.
    Il est à noter qu'elle ne peut concerner que les personnes ayant la double nationalité, puisque la France s'est engagée à ne pas créer d'apatride.

    Bref. Tout ça pour dire que cette inégalité devant la loi et devant la qualité de français existe depuis fort longtemps. Il est triste que l'on ait eu besoin d'attendre (moi la première) la récente polémique autour de la question pour s'en rendre compte.

    Conclusion 1 : Je ne sais pas s'il y a une leçon à tirer de tout cela. L'article (ou sa dernière modification) date de mars 1998... C'est à dire le gouvernement Jospin et une majorité de gauche au parlement.
    De là à en arriver à mon raccourci habituel (tous les mêmes !)...

    Adelin

    Conclusion 2 : je m'en vais à l'instant éplucher le code civil pour en tirer toutes les horreurs et immondices et les dénoncer avant que notre président adoré n'en fasse un argument de vente...

    RépondreSupprimer
  2. Tu as raison j'aurais du préciser que la déchéance existait déjà mais elle ne s'appliquait jusqu'à présent "qu'aux" cas de terrorisme il me semble. Nicolas Sarkozy a proposé de l'étendre aux citoyens d'origine étrangère portant atteinte à la vie d'un policier et ce cher Hortefeux est même allé jusqu'à évoquer l'idée de l'étendre aux cas, par exemple, de polygamie... (cette dernière observation se passe de commentaire)
    Cela prouve en tout cas qu'il s'agissait bien d'une manœuvre politicienne de la part de notre président visant principalement à faire sensation auprès de l'électorat d'extrême droite (et ce sans faire preuve d'une véritable originalité législative)

    RépondreSupprimer
  3. "L'individu qui a acquis la qualité de Français peut, par décret pris après avis conforme du Conseil d'Etat, être déchu de la nationalité française, sauf si la déchéance a pour résultat de le rendre apatride :

    1° S'il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ;

    2° S'il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit prévu et réprimé par le chapitre II du titre III du livre IV du code pénal ;

    3° S'il est condamné pour s'être soustrait aux obligations résultant pour lui du code du service national ;

    4° S'il s'est livré au profit d'un Etat étranger à des actes incompatibles avec la qualité de Français et préjudiciables aux intérêts de la France."

    Ca ne concerne donc pas uniquement le terrorisme. Et certaines dispositions me semblent très floues... C'est à dire potentiellement très larges.

    Quant à la manoeuvre politicienne, je n'en doute pas un instant !

    Adelin

    RépondreSupprimer
  4. Pour élargir un peu le débat, je pense que le véritable problème n'est pas lorsque Sarko évoque l'élargissement des conditions de la déchéance de la nationalité, mais lorsqu'il dit que la nationalité française "se mérite"...

    En effet, et en vertu de l'article 1er de la DDHC invoquée par l'Octopus, soit l'égalité entre les êtres humains, pourquoi un humain né en France et de parents , grand parents (jusqu'ou aller comme ça dans l'ascendance de chacun pour se justifier être un "bon " français?)... serait il français de droit, et non un être humain né hors du territoire ? C'est à ce niveau là, me semble t-il, que l'inégalité apparaît...

    D'où ma question : être français signifie t-il être né en France (nationalité par le territoire), avoir une ascendance française (nationalité par le sang) ou avoir des valeurs communes... Dans le dernier cas,on pourrait remettre en cause la nationalité de beaucoup de citoyens... (49% si on considère uniquement les citoyens ayant exercé leur droit de vote, et ce contre les valeurs de Sarko)

    Caro

    RépondreSupprimer
  5. Bien d'accord avec cette analyse, elle me rappelle un sketch de Jamel Debouzze tiré de son nouveau DVD, où, sous prétexte d'obtenir un passeport français, il se doit de connaître par coeur l'Histoire de France, la Marseillaise, la gastronomie...ce que beaucoup de français nés en France de parents français ne sont pas en mesure de reproduire.
    Cette situation caricaturale n'est pourtant pas très éloignée de la réalité quand on connait les difficultés administratives rencontrées par des citoyens français d'origine étrangère pour renouveler leurs papiers d'identité ("Vous êtes français...prouvez le!". Cette situation a d'ailleurs été dénoncée par la ligue des droits de l'homme en janvier 2010.
    Bref, tout ça pour dire qu'on est, en France, confrontés à un double traitement alors même que tous les hommes "naissent et demeurent libres et égaux en droits".

    RépondreSupprimer