lundi 31 janvier 2011

De la citoyenneté

"Nicolas Sarkozy a transformé la France en spectatrice de son évolution" 
Jacques Julliard

Cette phrase prononcée durant la conclusion des Etats Généraux du renouveau m'a semblé refléter cette vision active de la citoyenneté qu'il nous faut prendre en considération. L'action citoyenne ne se résume pas au vote pour un représentant. C'est dans le partage, la confrontation des points de vue et des expertises, le débat et le compromis que se forge une véritable démocratie. Et il semble que nous ayons tendance à l'oublier, mettant ainsi de côté les formidables capacités d'innovation de la société civile. Il est de notre devoir de passer du rôle de spectateurs passifs à celui d'acteurs activement engagés, surtout face aux nouveaux défis de notre République mais aussi de l"Europe et du monde.

"Soyons nous même le changement que nous voulons réaliser"
Pierre Larrouturou




Les Etats Généraux ont permis à 21 000 spectateurs de s'engager dans ce processus d'implication du citoyen durant 3 jours de d'analyse, de réflexion et de débat.

Je me propose ici de vous livrer certaines synthèses que j'ai pu faire parmi les quelques débats auxquels j'ai assisté. Il s'agit de pistes de réflexion intéressantes, mettant en avant des points du vue pouvant donner une dimension nouvelle à notre analyse des évènements actuels.

Egalité Homme-Femme passer du discours aux actes.
Avec Benoît Hamon, Corinne Lepage, Lilian Halls French et Christiane Marty.

Aujourd'hui, dans les entreprises du CAC 40, les femmes représentent 15% des membres des Conseils d'Administration.

Si de nombreuses avancées législatives ont pu être appréciées, la réalité quotidienne des femmes reste très fortement marquée par les inégalités. Il faut donc passer d'une égalité formelle à une égalité réelle.
Corinne Lepage explique cette nécessité d'égalité d'un point de vue politique : une faible représentation politique des femmes ne leur permet pas d'être elles-même au sein d'un univers essentiellement masculin. Elles ont le pouvoir de modifier les manières de faire de la politique, mais pour changer les règles du jeu il faut peser sur l'échiquier politique.

Cette inégalité réelle des femmes s'explique de deux manières:

- Les inégalités hommes/femmes sont différentes des autres : ce sont les plus anciennes, les plus uniformément réparties, les plus invisibles et surtout les plus tolérées des inégalités. Beaucoup de stéréotypes sur le genre restent véhiculés par l'éducation mais également au travers des médias. La question est, pourquoi sommes nous si passifs?

- Il y a une véritable absence de volonté politique en matière d'égalité hommes/femmes. On a le sentiment que les femmes ont déjà obtenu beaucoup de droits au cours du XXème siècle et que les inégalités restantes vont s'atténuer avec le temps. Ainsi, les questions d'égalité hommes/femmes sont mises en avant par les partis mais reléguées à la fin des agendas politiques. Pourtant, une société démocratique qui se donne comme objectif  l'égalité des droits humains se doit d'influencer l'égalité hommes/femmes.

Quelques mesures concrètes ont alors été mises en avant :
Deux résolutions prisent en 2010 par le Parlement Européen et la Commission européenne : elles proposent de mettre en place une "politique intégrée" visant à prendre en considération la question du genre dans tous les programmes politiques de l'UE quelque soient les domaines évoqués. Elles proposent également une surveillance beaucoup plus accrue des budgets européens et de leur impact réel sur l'égalité hommes/femmes.

De plus, dans se convention pour l'égalité réelle, Benoit Hamon a proposé la mise en place d'une "interdiction de tout achat d'un acte sexuel non désiré" pénalisant ainsi les clients de la prostitution tout en favorisant la réinsertion et l’accompagnement des prostituées.


Culture et identité nationale, des concepts dépassés?
Alain Finkielkraut


Voici deux points soulevés par Finkielkraut lors de cette conférence :

- On a observé une évolution du sens de la culture. Aujourd'hui, nous faisons face à une hyper-démocratisation de la culture ou celle-ci s'apparente à des pratiques, des coutumes, elle renvoie à la spontanéité de chacun. Or la culture humaniste n'était pas une manière pour chacun d'être lui-même mais une sortie, une aliénation. Aujourd'hui, la culture est perçue comme lien social, connexion  dans l'ère numérique de l'instantanéité alors qu'il s'agit au contraire d'une déconnexion, d'un détour qui s'effectue seul.

- Selon lui, il n'y a rien d'ignoble au débat sur l'identité nationale. En période d'immigration, il est nécessaire pour une Nation de réfléchir à ses rêves, ses passions, ses coutumes. Or, la France s'absente d'elle même pour être plus accueillante aux autres car elle se reproche la collaboration et la colonisation. Il émerge une nouvelle fierté, celle d'être contemporain. Le patriotisme temporel se substitue au patriotisme géographique. Nous sommes supérieurs à ces ancêtres qui ont collaborés. Pourtant, il faut savoir concilier le remord et la fierté. Il faut faire place dans la mémoire à l'admiration à l'heure où le "devoir de mémoire" ne s'applique qu'aux crimes.

Et si la croissance ne revenait pas?
Anne Hidalgo, Pierre Larrouturou, Dominique Méda et Marie-Anne Montchamp. 


Dans nos sociétés, la croissance a un rôle énorme : elle est un régulateur, une condition nécessaire au bon fonctionnement de l'économie. Adam Smith préconisait déjà que tous, nous nous occupions de l'augmentation de la production.

Ce rôle centrale de la croissance entraîne une extrême difficulté à la remettre en question. Pourtant, dès l'origine, Kuznets, l'inventeur du PIB, l'a remis en cause car il constituait un indicateur imparfait du bien être.

Aujourd'hui il apparaît clairement que la croissance actuelle n'est pas soutenable. Pour T. Jackson, on ne peut imaginer ce rythme de croissance pour 9 milliards d'habitants d'autant qu'il n'y a pas de découplage entre la croissance et ses effets environnementaux. On est donc face à une grande contradiction : on a besoin de croissance pour lutter contre le  chômage mais la croissance est nuisible et détruit l'environnement.

Alors que faire?

- Il faut renouveler nos instruments de mesure de la croissance et développer d'autres indicateurs qui mesureraient l'évolution du patrimoine naturel et la santé sociale.
- Il faut  remettre en cause nos disciplines actuelles : l'économie a joué avec des chiffres sans prendre en compte les flux de matière et la dégradation de l'environnement.
- Il faut que la contrainte écologique guide nos comportements.
- Il faut anticiper les effets de la croissance sur l'emploi sois en proposant une réduction massive du temps de travail soit en préconisant un travail de qualité. Nous avons une chance unique de remettre le travail au coeur de nos préoccupations.

Comment ?

-Agir au niveau européen voir international.
-Moins consommer pour plus de lien : en préconisant par exemple une redistribution radicale des revenus avec la mise en place d'un salaire maximum.

Vivons-nous un temps de crise?
Michel Serres.


- Il parait nécessaire de revenir sur la notion de crise. Venant du grec juger et représentant la bifurcation qu'un tribunal doit effectuer à la fin d'un procès, la crise est ensuite entrée dans le vocabulaire médical. Ainsi, l'organisme atteint un pic où il doit choisir entre la mort et la guérison, mais sans retour au statu quo, l'organisme atteint un nouvel état.
Il faut bien garder en tête que s'il y a une crise, aucun retour en arrière n'est possible car cela entraînerait la répétition d'une crise similaire.

- On ne se rend pas compte de la profondeur des causes de la crise. L'homme n'a pas pris la mesure des évènements majeurs qui ont transformé sa vie. Ainsi, un évènement est d'autant plus nouveau qu'est long le temps que cet évènement clôt.
Le nombre de paysans a considérablement diminué depuis le début du siècle tant et si bien qu'en 1970, l'ère néolithique de l'homme fondamentalement proche de la terre s'est achevée sans qu'on le réalise vraiment.
Après la seconde guerre mondiale, la médecine est devenue réellement efficace, augmentant considérablement l'espérance de vie modifiant également notre rapport à la douleur (l'invention de la péridurale a définitivement mis fin à la citation de la Bible selon laquelle la femme "accoucheras dans la douleur"), modifiant également le corps humain qui se découvre dans les années 60,70 car il devient montrable.
De plus, les nouvelles technologies (avec l'invention du portable et d'internet) nous ont fait habiter un espace nouveau. Nous sommes sans arrêt voisin avec tout le monde, il n'y a plus de distance du tout.
Ainsi, ces nouveaux espaces, ces nouveaux rapports au corps et à la vie impliquent une nouvelle politique. Nous n'avons pas mesuré la largeur de la crevasse qui nous sépare du passé, et la crise dont on parle occulte ces profondes transformations.

- Selon Michel Serres, l'individu en tant que tel est né assez récemment (Jacques Julliard parlera plutôt d'une nouvelle forme d'individualité) après la Seconde Guerre Mondiale. L'attitude des joueurs de l'équipe de France durant la dernière Coupe de monde en est parfaitement symptomatique : il n'ont pas réussi à jouer ensemble, à former une équipe.
On est donc en présence d'une nouvelle donne sociale où l'individu est né et a du mal à nouer des relations sociales. Comment nouer de nouveaux rapports? Quels sont les nouveaux rapports à inventer?
Pour lui, l'identité (ce qui me constitue) nationale (mon appartenance) est une erreur sémantique grave. Car confondre identité et appartenance c’est ça le racisme.
















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